De Eredan.

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L'épopée de Dame Jeanne

Et bien, on peut dire que cette journée était riche en émotion...

Cette apparition, cette tentative de meurtre et l'acquisition de nouveaux pouvoirs transcendantaux avaient vite fait de perturber l'équilibre casanier de la prêtresse.

Et voilà Dame Jeanne, seule, sur les routes, marchant dans les pas du Traquemage. Elle ne pouvait s'empêcher de regretter son départ précipité, elle qui aurait tant aimé faire ses adieux à ses soeurs nônes de manière solennelle. Perdue dans ses pensées, elle ne put alors retenir un sanglot. Chaque intersections étaient potentiellement, à ses yeux, un coupe gorge. L'angoisse, dont elle ne pouvait se défaire, allait jusqu'à lui donner des haut le coeur...

Là!

Non, elle ne rêvait pas: quelqu'un, ou quelque chose, se trouvait derrière ce buisson, et venait de la faire sursauter en faisant un bruit. Transpirant à grosses gouttes sous la pression, Dame Jeanne, tremblante, s'empara de sa masse d'arme, et la brandit en direction du buisson.

« Qui va là?! » cria-t'elle, dans un essai vain d'intimidation.

Bien que tout s'emmêlait dans son esprit, Dame Jeanne pensait dès à présent à un plan de bataille (ou, pour être plus précis, à un plan de fuite). Tout cela resta velléité, une jeune femme au masque de voleur et aux cheveux violets sortant de sa planque.

« Et bien, tu m'as vue! » lança-t'elle à Dame Jeanne, en souriant. Cette dernière ne répondant pas après avoir cru faire un début d'infarctus, elle enchaîna:

- « Je m'appelle Hélena! Et toi? »

Dame Jeanne baissât sa garde, soupira de soulagement, cette charismatique personne ne lui voulant apparemment point de mal. Elle se présenta alors:

- « Je me nomme Dame Jeanne, et je suis sur la piste d'un Traquemage blessé. L'aurais-tu vu passer? »

En guise de réponse, Hélena haussa les épaules et fit mine qu'elle n'en savait rien. La tempête avait cessée sur la forêt des murmures, et les deux femmes grelotaient de froid, trempées de la tête aux pieds.

« Hum... Peut-être que tu pourrais admettre que tu as perdue la trace de ta proie, qu'on aille se réchauffer dans une auberge? »

« Hum... Je pense que je peux l'admettre. Connais-tu le chemin du village le plus proche? »

« Oui, c'est le cas. Allons-y! » Les deux femmes se mirent donc en route du village de Kaldorf. Hélena était particulièrement bavarde, et contait bien des récits à Dame Jeanne, qui l'écoutait sagement... Sans en croire la moitié.

Mais après tout, traverser une forêt est bien moins stressant avec un camarade, même inconnu, que seule.

Quelques heures de marche plus tard, éreintées, les deux femmes arrivèrent dans le bourg: Jeanne remarqua qu'Héléna semblait sur ses gardes, et qu'elle parlait bien peu depuis que le village avait été en vue. Mais elle était bien trop fatiguée pour pousser la réflexion plus loin, et elles se dirigèrent vers l'auberge pour y couler un repos bien mérité.

Après une bonne nuit de sommeil, les deux femmes se levèrent.

« Bon, et maintenant, tu vas faire quoi? » demanda Hélena.

« Poursuivre ma quête. Méra, ma déesse, m'a ordonné de me rendre au Tombeau des Ancêtres afin d'affronter une épreuve »

Hélena resta dubitative.

« Une épreuve? Quelle épreuve? »

Jeanne n'étant pas en mesure de répondre, et il y eut un silence de quelques secondes.

« Ben alors? »

« Je dois faire ce que ma déesse m'a ordonné de faire, voilà tout. J'ai foi en elle. » répondit Dame Jeanne afin de contourner le problème, et commençant à réunir ses affaires. C'est à ce moment là qu'elle se rendit compte qu'elle ne portait plus son pendentif.

« Mon pendentif! Où est il?! »

« Quel pendentif? »

« Mon pendentif! Le symbole de Méra! »

« Tu ne portais pas de pendentif, hier... »

Sans l'écouter, Jeanne retourna toute la chambre en quête de son symbole religieux, en vain.

Miséricorde! Voilà qu'après avoir été agressée au temple de Precadès, après avoir chassé son assaillant des heures durantes sous une pluie torrentiel sans résultats, elle avait maintenant perdu le symbole de sa foi envers sa divinité! Comment cela pouvait être pire? Elle fit quelques exercices de respiration afin d'essayer de se calmer, puis se retourna vers Hélena. Sauf qu'Hélena avait disparue. Dame Jeanne rougit de colère comprenant le mauvais tour que lui avait joué la voleuse, et se précipita vers la sortie afin de lui mettre la main dessus.

« Ola, 'tendez, la rouquine, là! » L'aubergiste, un grand homme imposant, était positionné devant la porte.

« Que me voulez-vous? »

« Ben faudrait p'tet payer vot' nuit à l'auberge, non mais! Vot' copine l'est partie trop vite, mais vous, vous m'échapperez pas! »

« Oui, oui, c'est vrai... Attendez. »

Confuse, et perturbée par les pulsions meurtrières qu'elle éprouvait en pensant à la roublardise d'Héléna, Dame Jeanne plongea la main dans son sac, en sortit sa bourse, pleine à craquer, non pas de pièces d'or, mais... de châtaignes. Le taulier, voyant ceci, l’interrogea du regard en haussant un sourcil.

« Je peux tout vous expliquer... » balbutia Dame Jeanne.

Cependant, l'homme ne semblait pas l'entendre de cette oreille, et commença à s'approcher d'elle.

« Soit... Vous ne me laissez pas le choix. »

Dame Jeanne fixa l'homme et... se mit à courir de l'autre côté de la pièce, pour sauter, non sans difficultés, par la fenêtre qui y était ouverte.

« Au voleur! La rouquine, là! Arrêtez la! »

La course poursuite était engagée, et plusieurs personnes prirent le parti de poursuivre la prêtresse. Heureusement, le village était à l’orée d'un bois, et Dame Jeanne s'y engouffra, parvenant à se cacher des villageois qui la traquaient. Complètement déboussolée, Jeanne était perdue. Pour récapituler ses 48 dernières heures, elle avait été agressée, volée, poursuivie, et maintenant, perdue. Elle prit donc partie d'un peu de repos, reprenant tant bien que mal son souffle.

Après quelques dizaines de minutes, elle entendit quelqu'un appeler à l'aide. Bien qu'elle se doutait que cela allait l'amener au devant de nouveaux problèmes, elle s'enfonça dans le bois afin de voir ce qu'il se passait. Quel désopilant spectacle! Voici que celle qui l'avait dépossédée de ses biens était prise dans un piège magique: 3 runes posées au sol avaient créé une petite dimension en forme pyramidale, dans laquelle était enfermée Hélena. Mesquine, Jeanne s'approcha de la prisonnière avec un sourire en coin, alors qu'Hélena s'était tue, affichant un visage hébété, en voyant son ancienne victime s'approcher. Elle commença alors à bégayer: « Oh, tiens, Jeanne, c'est sympa que tu sois là. Je crois qu'il y a eu un petit malentendu, tout à l'heure.. »

« Hum, oui, je t'écoute? » répondit-t'elle en tournant autour du piège

« Oui, en fait, je suis partie, pour aller chercher de la monnaie, tu vois? J'avais un ami dans le village, qui me devait quelques pièces... Alors je suis allé le voir, mais... Mais... Oui, voilà: on m'a dit qu'il était parti chercher du bois, dans ce coin! Tu me comprends, hein... »

Dame Jeanne hocha doucement le tête, ne pouvant masquer le plaisir qu'elle prenait de la situation.

« ... Et donc, voilà que je me retrouve piégé là dedans! Surement un piège à Volks, tu crois pas? C'est vrai qu'il y en a pas mal dans cette région... »

Dame Jeanne commença à prendre un air grave, et Hélena comprit que ce n'est pas de cette manière qu'elle pourrait l'amadouer. Elle baissa la tête, et lança un regard suppliant à Dame Jeanne.

« Je... S'il te plaît, fais moi sortir d'ici. »

« Hum, et pourquoi ferais-je cela? » Dame Jeanne restait méfiante.

« Quelqu'un me chasse. Si je ne parviens pas à sortir de ce piège, il va me retrouver, c'est sûr. Et plus jamais je ne verrais la lumière du jour. »

Le coeur de Dame Jeanne fit un bond. Malgré ce que la voleuse lui avait infligé, elle ne pouvait se résigner à laisser une personne, quelle qu'elle soit, à la merci du premier venu. Et quand bien même Hélena semblait commettre bien des larcins, elle ne pouvait percevoir de malfaisance en elle...

Ne pouvant plus supporter ce regard qui le touchait au plus profond de ses entrailles, elle retira une pierre d'un coup de pied, brisant le piège. La voleuse lui tendit son pendentif, afficha un sourire triste, puis s'enfuit sans un mot. Dans la minute, un homme apparut, et interpela Jeanne.

« Bonjour, je me nomme Erevent. N'auriez vous pas vu une femme aux cheveux violets, dans le coin? »

Jeanne fit mine que non, espérant que son acte ne portera point préjudice à quelqu'un d'autre... Ce dont elle doutait fort. Dame Jeanne se remit en route du Temple des ancêtres, se préparant à bien de nouvelles épreuves.



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